(A la suite de l'échec de son mariage avec le narrateur,
Odile quitte le domicile conjugal.)
J'aurais dû partir,
quitter Paris, mais je ne pouvais m'y décider ; je trouvais un douloureux
bonheur à m'accrocher aux moindres objets qui me rappelaient Odile. Au moins
dans cette maison, le matin à demi éveillé, il me semblait entendre une voix
claire et douce qui, par la porte ouverte, criait : « Bonjour, Dickie ! ». Ce
mois de janvier était un mois de printemps. Les arbres nus se détachaient sur
un ciel parfaitement bleu. Si Odile avait été là, elle aurait mis, comme elle
disait, « un petit tailleur », enroulé autour de son cou son renard gris et
serait sortie dès le matin [...].
André MAUROIS Climats, pp. 115 — 116 éd. Le livre de poche,
1983
? a- Pourquoi le narrateur ne se décide-t-il pas à
quitter le domicile conjugal ?
b- Relevez
et expliquez un procédé d’écriture qui en rend compte.
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(Qays et Laylâ sont deux amoureux qui discutent
de l'avenir de leur relation...)
Laylâ pleurait maintenant : « Alors, je te le redis, tu nous
perds, Qays. Au moins, fais comme les autres : parle de moi, mais sous un autre
nom. Qays, si tu m'aimes, écoute-moi !
- Mais je
t'aime trop, justement ! Comment pourrais-je cacher ton nom ? Je serais
indigne3 de toi, de
moi, de Dieu qui nous fait ce cadeau.
Au diable les usages4 ! Je les renverserai ! J'abattrai ces
murailles ! Il faudra bien que tu sois à moi puisque c'est moi qui le veux !
Fais confiance à cet amour. Je te le disais : il est trop fort, il est trop
neuf pour qu'on ne l'écoute pas, pour qu'il ne triomphe pas. Aie confiance,
Laylâ !
Il n'y a rien d'autre à faire, et c'est la meilleure façon de
gagner ! »
? Qays
apparaît comme un homme révolté. Relevez et expliquez deux procédés d'écriture
par lesquels l'auteur en rend compte.
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[…] Il me fallait me faire une
raison, admettre ce que mon coeur s’obstinait à ne pas regarder en face.
La vie est un train qui ne s’arrête à aucune gare. Ou on le prend en marche ou on le regarde passer sur le quai, et il n’est pire tragédie qu’une gare fantôme.
Avais-je été heureux, après ? Je crois que oui; j’ai connu des joies, des moments inoubliables; j’ai même aimé et rêvé comme un mioche ébloui. Pourtant, il m’a toujours semblé qu’une pièce manquait à mon puzzle, que quelque chose ne répondait pas tout à fait à l’appel; qu’une absence me mutilait; bref, que je ne faisais que graviter à la périphérie du bonheur.
La vie est un train qui ne s’arrête à aucune gare. Ou on le prend en marche ou on le regarde passer sur le quai, et il n’est pire tragédie qu’une gare fantôme.
Avais-je été heureux, après ? Je crois que oui; j’ai connu des joies, des moments inoubliables; j’ai même aimé et rêvé comme un mioche ébloui. Pourtant, il m’a toujours semblé qu’une pièce manquait à mon puzzle, que quelque chose ne répondait pas tout à fait à l’appel; qu’une absence me mutilait; bref, que je ne faisais que graviter à la périphérie du bonheur.
Yasmina Khadra in, »Ce que le jour doit à la nuit »
? Quels sont les procédés d’écriture qui rendent compte des
sentiments de Younes envers Emilie ?
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(À quarante-six ans, Romain Gary livre ses
souvenirs dans « La
Promesse de l'aube ». Dans ce passage, il raconte
comment, enfant, il a rencontré son premier amour.)
« J'avais déjà près de neuf ans
lorsque je tombai amoureux pour la première fois. Je fus tout entier aspiré par
une passion violente, totale, qui m'empoisonna complètement l'existence et
faillit même me coûter la vie. Elle avait huit ans et elle s'appelait
Valentine.
? Par quel procédé d’écriture l’auteur souligne-t-il
l’intensité de l’émoi du jeune garçon ?
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(Après un violent combat
et alors que les bombardements continuent, le narrateur, soldat allemand, se
retrouve dans le même trou d'obus avec un soldat français.)
Alors il ouvre les yeux. Il m'a sans
doute entendu et il me regarde avec une expression de terreur épouvantable. Le
corps est immobile, mais dans les yeux se lit un désir de fuite si intense que
je crois un instant qu'ils auront la force d'entraîner le corps avec eux, de
faire des centaines de kilomètres rien que d'une seule secousse. Le corps est
immobile, tout à fait calme et, à présent, silencieux ; le râle s'est tu, mais
les yeux crient et hurlent ; en eux toute la vie s'est concentrée en un effort
extraordinaire pour s'enfuir, en une horreur atroce devant la mort, devant moi.
Erich Maria REMARQUE, À L'ouest rien de nouveau, Le Livre de poche
? Dans ce paragraphe,
l'auteur met en évidence la peur ressentie par le soldat français. Relevez et
analysez deux procédés d'écriture employés pour traduire l'intensité de ce
sentiment.
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Les
parents de l’enfant étaient les enfants de Monsieur Linh. Le père de l’enfant
était son fils. Ils sont morts dans la guerre qui fait rage au pays de puis des
années déjà. Ils sont partis un matin travailler dans les rizières, avec
l’enfant, et le soir ils ne sont pas revenus. Le vieil homme a couru. Il
est arrivé essoufflé près de la rizière. Ce n’était plus qu’un trou immense et
clapotant, avec sur le côté du cratère un cadavre de buffle éventré, son joug
brisé en deux comme un brin de paille. Il y avait aussi le corps de son fils,
celui de sa femme, et plus loin la petite, les yeux grand ouverts, emmaillotée,
indemne, et à côté de la petite une poupée, sa poupée, aussi grosse qu’elle, à
laquelle un éclat de la bombe avait arraché la tête. La petite fille avait dix
jours. Ses parents l’avaient appelée Sang diu, ce qui dans la langue du pays
veut dire « Matin doux ». Ils l’avaient appelée ainsi, puis ils
étaient morts. Monsieur Linh a pris l’enfant. Il est parti. Il a décidé de
partir à jamais. Pour l’enfant.
Philippe CLAUDEL, La Petite fille de Monsieur
Linh
? Quelle idée de la guerre
ce paragraphe donne-t-il au lecteur ?
Relevez
et nommez un procédé d’écriture employé par l’auteur pour exprimer cette idée.
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Je ne me souviens pas,
pendant mes dix-huit premières années, d’avoir eu jamais un entretien d’une
heure avec lui. Ses lettres étaient affectueuses, pleines de conseils,
raisonnables et sensibles; mais à peine étions-nous en présence l’un de l’autre
qu’il y avait en lui quelque chose de contraint que je ne pouvais m’expliquer,
et qui réagissait sur moi d’une manière pénible. Je ne savais pas alors ce que
c’était que la timidité, cette souffrance intérieure qui nous poursuit jusque
dans l’âge le plus avancé, qui refoule sur notre cœur les impressions les plus
profondes, qui glace nos paroles, qui dénature dans notre bouche tout ce que
nous essayons de dire, et ne nous permet de nous exprimer que par des mots
vagues ou une ironie plus ou moins amère, comme si nous voulions nous venger
sur nos sentiments mêmes de la douleur que nous éprouvons à ne pouvoir les
faire connaître. Je ne savais pas que, même avec son fils, mon père était
timide, et que souvent, après avoir longtemps attendu de moi quelques
témoignages d’affection que sa froideur apparente semblait m’interdire, il me
quittait les yeux mouillés de larmes et se plaignait a d’autres de ce que je ne
l’aimais pas.
Benjamin Constant, Adolphe
? Plusieurs procédés d’écriture permettent de décrire la
timidité et ses effets. Relevez-en deux et expliquez-les.
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J’étais bourré de remords et
d’impuissance. Des remords parce que, elle, avait raté sa vie deux fois, la
première fois à cause de mon père, la seconde fois parce que je n’avais pas
répondu à son attente et que je ne l’avais pas aidée, parce que je n’avais pas
pu l’aider à racheter sa vie. Je n’ai plus voulu vivre dans l’appartement de
deux pièces sombres avec cuisine ou je l’avais vue peiner.
Eugène Ionesco, Le Solitaire.
? Après la mort de sa mère, le narrateur a éprouvé des
sentiments de « remords et d’impuissance » de « culpabilité et de regret. ». Relevez
un procédé d’écriture qui illustre l’un de ses sentiments.
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Chaque livre, en outre, avait
une odeur particulière selon le papier où il était imprimé, odeur fine,
secrète, dans chaque cas, mais si singulière que J. aurait pu distinguer les
yeux fermés un livre de la collection Nelson des éditions courantes que
publiait alors Fasquelle. Et chacune de ces odeurs, avant même que la lecture
fût commencée, ravissait Jacques dans un autre univers plein de promesses déjà
[tenues] qui commençait déjà d’obscurcir la pièce où il se tenait, de supprimer
le quartier lui-même et ses bruits, la ville et le monde entier qui allait
disparaître totalement aussitôt la lecture commencée avec une avidité folle,
exaltée, qui finissait par jeter l’enfant dans une totale ivresse dont les
ordres répétées n’arrivaient même pas à le tirer.
Albert Camus, Le premier homme.
? Relevez et expliquez deux procédés d’écriture utilisés
par l’auteur pour mettre en relief la passion de Jacques pour la lecture.
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Les jours se sont enfuis, d’un vol mystérieux,
Mais toujours la jeunesse éclatante et vermeille
Fleurit dans ton sourire et brille dans tes yeux.
Théodore
de BA%VILLE, Roses de _oël, 1845.
? D’après ces vers, le poète garde de sa mère une image
rayonnante de jeunesse et de joie. Relevez et identifiez un procédé d’écriture
mettant en relief cette image.
Correction!
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