Sujet : Vous avez lu, dans un site littéraire, un article dont le titre
est « la jeunesse est un sommeil, l’amour en est le rêve ».
Désapprouvant la thèse de cet article, vous développez votre attitude dans la
rubrique « commentaire ».
Introduction « La jeunesse est un défaut… mais
le défaut de l’âge c’est de voir les défauts de la jeunesse ». Effectivement,
il convient, à la manière de Thomas Bernard, de reconnaître la
sensibilité voire la fragilité de cet âge mais, mon cher monsieur, la lecture
de votre article m’inspire sur « la part remplie du verre ». Avec
tout mon respect pour votre personne, je pense que vous avez porté atteinte
et manqué de respect à l’égard de la jeunesse dont je me vois un fervent
défenseur. Vous n’avez pas également épargné l’amour qui
demeure malgré tout « le seul rêve qui ne se rêve pas »
légitime. |
Développement D’ores et déjà, on a du mal à
exclure l’amour de l’imagination d’un jeune avide d’un avenir souriant et
prometteur ; en effet, ce sentiment noble a toujours été un tremplin
1 de
succès pour ce qu’il est susceptible de réaliser. Pour commencer, monsieur, sachez que
la jeunesse est le terrain idéal favorisant la naissance de l’amour ; en
fait, c’est le moment le plus convenable pour vivre des expériences
sentimentales même si elles aboutissent à l’échec car, pour
l’individu, échouer est toujours aussi bénéfique que la réussite. Tout se
passe comme si j’imaginais entendre la voix d’André Gide me
disant : « Persuade-toi de ta jeunesse et de ta
force ! ». Marcel Proust, quant à lui, va au-delà de cette idée en
réhabilitant l’adolescence qui a toujours été la cible de plusieurs
catégories sociales. Cet écrivain admet qu’ « [elle]
est le seul temps où l’on ait appris quelque chose ». Par ailleurs, ce que j’ai du mal à
« digérer » c’est la confusion hallucinante 2 au
niveau des termes auxquels vous avez recours dans votre article ; à
titre indicatif, n’avez-vous pas confondu rêve et sommeil ? Quoiqu’il
en soit, il nous est incontestablement illégitime de caractériser la jeunesse
de la sorte car vous auriez dû, monsieur, adopter le statut d’un
donneur de conseils dont l’expérience serait profitable pour la jeunesse
« en sommeil ». Certes, cette période d’âge est tellement
sensible que l’individu semble errer dans un vaste « désert » mais
il n’en reste pas moins vrai que de cette errance
fructueuse naît, au bout d’une quête identitaire, une nouvelle vision du
monde, une nouvelle façon de voir les choses. A ce propos,
on ne trouve mieux étayer cette attitude que par la
citation de Milton qui pense que « la jeunesse montre l’homme
comme le matin montre le jour ». Aussi pouvons-nous dire que l’amour
c’est le partage et la complémentarité entre deux jeunes « cœurs »
qui, comme l’affirme Saint-Exupéry, cessent de « se
regarder l’un et l’autre [pour] regarder ensemble dans la même
direction ». Embellie par l’amour, la
jeunesse est analogue à « un roseau » qui selon l’expression
de La Fontaine « plie et ne romp[t]
pas » avec le temps. Elle est de même, la lumière qui
éclaire la destinée de l’individu en traçant les traits d’une vie placée sous
le signe du succès. En outre, le vrai amour est une
source intarissable d’espoir, de volonté et de détermination. S’alliant
au rêve il peut réaliser, comme l’illustre la psychanalyse 3 freudienne,
une véritable compensation 4 de tout ce qui reste au-delà
de nos moyens ; d’ailleurs La Marquise De Sévigné pense que « le
cœur n’a pas de vide ». Encore n’ai-je pas bien apprécié le
choix métaphorique du terme « rêve » lequel limite l’amour à son
aspect virtuel voire utopique alors qu’il fallait éviter un
pareil préjugé étant donné que ce sentiment remplit nos cœurs d’énergie et
d’enthousiasme suffisants pour accueillir aux bras ouverts toutes les
entraves auxquelles nous pouvons faire face. L’amour, mon cher monsieur, est loin de
succomber 5 à la loi du temps et il demeure encore loin de
subir les contraintes de l’espace ; et c’est en cela qu’on rejoint
l’avis d’un certain auteur qui trouve que « l’amour : c’est
l’espace et le temps rendus sensibles au cœur ». Je n’ai rien contre vous, monsieur, mais
votre article a provoqué mon amour propre sans que j’aie la moindre intention
de vous critiquer. |
Conclusion Il résulte de ce qui précède
qu’au-delà d’une critique acerbe d’un article sous-estimant les
jeunes, ce commentaire se veut comme une modeste tentative de défendre et de
réhabiliter la jeunesse malheureusement incomprise et victime de
marginalisation 6. Alors, accordez aux jeunes la chance de
s’épanouir et de s’affirmer au sein d’une société plus que jamais
injuste ! Accordez-leur le droit légitime de créer le monde qui leur est
propre et l’univers qui contiendrait leurs rêves et leurs ambitions !
Accordez-leur la possibilité de s’exprimer, de s’épancher et d’évacuer leurs
« entrailles7 » ! Les rêves ne sont-ils pas,
comme le pense Rodenbach, « les clés pour sortir de
nous-mêmes » ? Ainsi, cher monsieur, je ne
trouve mieux clore cette intervention que par cette citation de
Philippe Séguin qui voit qu’ « une heureuse vieillesse est le
fruit d’une sage jeunesse ». *** |
1 – ce
qui donne l’impulsion pour atteindre un but – 2 – surprenante – 3 – en psychanalyse technique d'investigation psychologique
freudienne par analyse du psychisme à travers l'inconscient – 4
– ce qui tend à satisfaire un manque ou une frustration – 5 – être
vaincu – 6 – mise à
l’écart– 7 –
profondeur de l’âme.
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