jeudi 4 novembre 2021

« La jeunesse est un sommeil, l’amour en est le rêve ».

 

Sujet : Vous avez lu, dans un site littéraire, un article dont le titre est « la jeunesse est un sommeil, l’amour en est le rêve ». Désapprouvant la thèse de cet article, vous développez votre attitude dans la rubrique « commentaire ».

Introduction

  « La jeunesse est un défaut… mais le défaut de l’âge c’est de voir les défauts de la jeunesse ». Effectivement, il convient, à la manière de Thomas Bernard, de reconnaître la sensibilité voire la fragilité de cet âge mais, mon cher monsieur, la lecture de votre article m’inspire sur « la part remplie du verre ». Avec tout mon respect pour votre personne, je pense que vous avez porté atteinte et manqué de respect à l’égard de la jeunesse dont je me vois un fervent défenseur. Vous n’avez pas également épargné l’amour qui demeure malgré tout « le seul rêve qui ne se rêve pas » légitime.

 

Développement

  D’ores et déjà, on a du mal à exclure l’amour de l’imagination d’un jeune avide d’un avenir souriant et prometteur ; en effet, ce sentiment noble a toujours été un tremplin 1  de succès pour ce qu’il est susceptible de réaliser.

  Pour commencer, monsieur, sachez que la jeunesse est le terrain idéal favorisant la naissance de l’amour ; en fait, c’est le moment le plus convenable pour vivre des expériences sentimentales même si elles aboutissent à l’échec car, pour l’individu, échouer est toujours aussi bénéfique que la réussite. Tout se passe comme si j’imaginais entendre la voix d’André Gide me disant : « Persuade-toi de ta jeunesse et de ta force ! ». Marcel Proust, quant à lui, va au-delà de cette idée en réhabilitant l’adolescence qui a toujours été la cible de plusieurs catégories sociales. Cet écrivain admet qu« [elle] est le seul temps où l’on ait appris quelque chose ».

  Par ailleurs, ce que j’ai du mal à « digérer » c’est la confusion hallucinante 2 au niveau des termes auxquels vous avez recours dans votre article ; à titre indicatif, n’avez-vous pas confondu rêve et sommeil ? Quoiqu’il en soit, il nous est incontestablement illégitime de caractériser la jeunesse de la sorte car vous auriez dû, monsieur, adopter le statut d’un donneur de conseils dont l’expérience serait profitable pour la jeunesse « en sommeil ». Certes, cette période d’âge est tellement sensible que l’individu semble errer dans un vaste « désert » mais il n’en reste pas moins vrai que de cette errance fructueuse naît, au bout d’une quête identitaire, une nouvelle vision du monde, une nouvelle façon de voir les choses. A ce propos, on ne trouve mieux étayer cette attitude que par la citation de Milton qui pense que « la jeunesse montre l’homme comme le matin montre le jour ».

  Aussi pouvons-nous dire que l’amour c’est le partage et la complémentarité entre deux jeunes « cœurs » qui, comme l’affirme Saint-Exupéry, cessent de « se regarder l’un et l’autre [pour] regarder ensemble dans la même direction ».

  Embellie par l’amour, la jeunesse est analogue à « un roseau » qui selon l’expression de La Fontaine « plie et ne romp[t]  pas » avec le temps. Elle est de même, la lumière qui éclaire la destinée de l’individu en traçant les traits d’une vie placée sous le signe du succès.

  En outre, le vrai amour est une source intarissable d’espoir, de volonté et de détermination.  S’alliant au rêve il peut réaliser, comme l’illustre la psychanalyse 3 freudienne, une véritable compensation 4 de tout ce qui reste au-delà de nos moyens ; d’ailleurs La Marquise De Sévigné pense que « le cœur n’a pas de vide ».

  Encore n’ai-je pas bien apprécié le choix métaphorique du terme « rêve » lequel limite l’amour à son aspect virtuel voire utopique alors qu’il fallait éviter un pareil préjugé étant donné que ce sentiment remplit nos cœurs d’énergie et d’enthousiasme suffisants pour accueillir aux bras ouverts toutes les entraves auxquelles nous pouvons faire face.

  L’amour, mon cher monsieur, est loin de succomber 5 à la loi du temps et il demeure encore loin de subir les contraintes de l’espace ; et c’est en cela qu’on rejoint l’avis d’un certain auteur qui trouve que « l’amour : c’est l’espace et le temps rendus sensibles au cœur ».

    Je n’ai rien contre vous, monsieur, mais votre article a provoqué mon amour propre sans que j’aie la moindre intention de vous critiquer.

 

Conclusion

  Il résulte de ce qui précède qu’au-delà d’une critique acerbe d’un article sous-estimant les jeunes, ce commentaire se veut comme une modeste tentative de défendre et de réhabiliter la jeunesse malheureusement incomprise et victime de marginalisation 6. Alors, accordez aux jeunes la chance de s’épanouir et de s’affirmer au sein d’une société plus que jamais injuste ! Accordez-leur le droit légitime de créer le monde qui leur est propre et l’univers qui contiendrait leurs rêves et leurs ambitions ! Accordez-leur la possibilité de s’exprimer, de s’épancher et d’évacuer leurs « entrailles7 » ! Les rêves ne sont-ils pas, comme le pense Rodenbach, « les clés pour sortir de nous-mêmes » ?

   Ainsi, cher monsieur, je ne trouve mieux clore cette intervention que par cette citation de Philippe Séguin qui voit qu’ « une heureuse vieillesse est le fruit d’une sage jeunesse ».  ***

 

 

1 – ce qui donne l’impulsion pour atteindre un but – 2 – surprenante – 3 – en psychanalyse technique d'investigation psychologique freudienne par analyse du psychisme à travers l'inconscient 4 – ce qui tend à satisfaire un manque ou une frustration – 5 – être vaincu – 6 – mise à l’écart– 7 – profondeur de l’âme.

 

 

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