vendredi 21 février 2025

Signol

 Julien part à la guerre, laissant derrière lui sa femme Hélène et son fils.


Dès le lendemain de son départ, elle avait repris le travail à l'auberge où il ne restait plus qu'un seul homme en cuisine, le vieux Mathieu, et de moins en moins de clients. La nuit, elle dormait avec son fils près d'elle dans le lit, un peu rassurée par cette présence chaude qui était un peu Julien, mais elle faisait des cauchemars dans lesquels se bousculaient les nouvelles entendues dans les rues et auxquelles elle ne comprenait pas grand chose. En effet, si, au début, on disait que tout serait terminé avant la fin de l'année, que la victoire serait rapide, il avait ensuite été question de retraite sur la Marne. À qui se fier? Où se trouvait la vérité ?


Elle s'était mise à guetter le facteur avant son départ à l'auberge où elle ne gagnait que quelques sous mais d'où elle était autorisée à ramener chez elle un peu de nourriture, ce qui l'aidait à vivre, ainsi que son enfant. Elle ne mesurait pas encore ce qui se passait là-haut, dans le Nord, mais elle le comprit vraiment en octobre quand le maire, vêtu de son écharpe tricolore, frappa à la porte de la maison d'en face et qu'une plainte de femme, atroce, interminable, monta jusqu'à l'aigu, parut ne devoir jamais retomber. Hélène la connaissait pour l'avoir rencontrée au marché, échangé quelques mots avec elle : cette femme était proche, elle lui ressemblait, et donc si le malheur était tombé sur elle, il était possible qu'il la frappât elle aussi, sans qu'elle pût s'en défendre.


Dès lors, Hélène vécut avec la morsure permanente de la peur, la hantise d'apercevoir le maire à un coin de rue ou d'entendre frapper à sa porte une fois qu'elle s'était réfugiée chez elle, avait fermé à clef, cherchant désespérément à élever un rempart entre le monde extérieur et son foyer. Seul le contact de son fils la rassurait un peu, car il personnifiait la vie et, de ce fait, lui semblait -il, éloignait la mort.


Ce qu'elle espérait également, et de toutes ses forces, c'était que Noël arriverait vite, car elle ne doutait pas que Julien reviendrai au moins en permission, et c'est ce dont elle s'informa dans la première lettre qu'elle lui envoya, croyant qu'une trêve générale mettrait alors fin aux combats.

Christian SIGNOL, Pourquoi le ciel est bleu 


La guerre a des conséquences néfastes sur la vie de la population. Citez-en deux que vous justifierez à l'aide d'indices textuels.

Pourquoi la nouvelle de la mort du voisin, annoncée par le maire, bouleverse-t-elle profondément Hélène ?

"Dès lors, Hélène vécut avec la morsure permanente de la peur". Que fait-elle pour surmonter sa peur ?

Relevez et expliquez un procédé d'écriture qui traduit l'angoisse d'Hélène.

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